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RESTAURATION DE LA BASILIQUE Un signe de fraternité

mardi 14 décembre 2010, par Collectif

Article porteur d’espérance, paru dans le quotidien L’expression le 12 décembre 2010 http://www.lexpressiondz.com/articl...

La hauteur de vue est le caractère des peuples hospitaliers.

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Notre Dame d’Afrique est un patrrimoine commun à tous les Algériens

Il est des gestes forts qui montrent que le dialogue des cultures, des religions et des civilisations n´est pas un vain mot. La hauteur de vue est le caractère des peuples hospitaliers. Ce lundi 13 décembre, sera célébrée la cérémonie, placée sous le haut patronage de Son Excellence Abdelaziz Bouteflika, président de la République, marquant le renouveau de la Basilique Notre-Dame d´Afrique restaurée sous la maîtrise d´ouvrage de la wilaya d´Alger. « Notre-Dame d´Afrique » rouvrira pleinement ses portes sous de nouveaux habits.

Le projet de restauration a débuté en novembre 2006. C´est un événement qui montre bien que l´Algérie n´est pas une terre antichrétienne. L´amitié islamo-chrétienne est une réalité de l´Algérie musulmane.

L´Algérie musulmane hospitalière

L´histoire est là pour témoigner que le peuple algérien musulman a toujours été hospitalier. Il fut et reste protecteur pour les croyants des autres religions du Livre. Il a différencié, en conformité avec les principes authentiques de sa religion, comme l´Emir Abdelkader l´a souvent rappelé, entre les chrétiens et le système colonial.

Tout comme il sait différencier, aujourd’hui, entres des sectes nuisibles qui pratiquent le prosélytisme agressif et les catholiques paisibles. Sachant que nombre de prêtres, à leur tête le cardinal Duval, durant la guerre de Libération nationale, ont soutenu le peuple algérien pour son Indépendance et plus tard, lors des années de la tragédie nationale, fidèles, ils ont vécu solidairement avec lui.

Il est important que des pays phares comme l´Algérie montrent le chemin, car, partout dans le monde, le recul du droit à la différence et du pluralisme est visible. L´histoire des monuments démontre pourtant que la symbiose sans syncrétisme est la marque des civilisations. Chaque culture emprunte à l´autre des traits universels ou spécifiques. L´architecture, l´art, et tous les domaines de la vie peuvent démontrer que toutes les cultures empruntent aux autres, tout en gardant leur génie propre.

En 1858, l´évêque d´Alger, Pavy, qui correspondait avec l´Emir Abdelkader, fit commencer la construction de la basilique. L´évêque décéda en 1866 et fut inhumé dans le choeur de la basilique qui ne fut totalement achevée qu´en 1872, après quatorze ans de travaux. Une statue en bronze de la Vierge Marie symbolise ce temple catholique. L´architecte, Jean Eugène Fromageau, la construisit sur un plan dit byzantin, inspiré de la Basilique de Sainte-Sophie, à Istanbul, la surmontant d´une coupole pour respecter la dimension orientale du pays.

Son plan offre la particularité d´être orienté avec le choeur au sud-ouest, au lieu de l´est habituellement. Construite sur le promontoire de Bologhine dominant la mer de 124 mètres, au nord d´Alger.

La basilique est considérée comme le pendant d´une autre basilique en rive Nord de la Méditerranée, Notre-Dame-de-la-Garde à Marseille. En terre d´Afrique de l´Algérie musulmane hospitalière, c´est un monument religieux qui exprime symboliquement la fraternité islamo-chrétienne. Sur le fronton du mur de l´abside, derrière l´autel, on peut lire en arabe, en amazigh et en français : « Notre-Dame d´Afrique priez pour nous et pour les musulmans. »

Dernière religion révélée qui se veut synthèse, confirmation et dépassement des révélations antérieures depuis Adam jusqu´à Jésus le Messie, fils de Marie, l´Islam apporte son éclairage et sa singularité définitifs pour la dernière phase de l´histoire de l´humanité.

Aujourd’hui, que le monde dominant est en crise profonde, à cause du « culte du veau d´or », le consumérisme et des formes multiples d´extrémisme, d´idolâtrie et de violence, il est impérieux de dialoguer et de respecter la dignité humaine, bafouée par tant de dérives.

Avoir œuvré ensemble pour restaurer un lieu de prière est un signe que le meilleur est encore possible. Après plus d´un siècle et demi d´existence et une période de manque d´entretien, la basilique dégradée par les vents marins et les tremblements de terre, surtout celui de mai 2003, a été restaurée grâce à un concours de bonnes volontés, algériennes, (wilaya d´Alger et entreprises publiques et privées), françaises (les collectivités locales de la région Provence-Alpes-Côte d´Azur, le département des Bouches-du-Rhône et la ville de Marseille) et de l´Union européenne, le tout sous l´égide de l´Etat algérien. La basilique a bénéficié ainsi d´une restauration d´envergure, supervisée sur le plan technique par un architecte marseillais Xavier David qui a mené celle de Notre-Dame de la Garde.

De l´espérance

Le plan de restauration a pu être opérationnel suite aux facilités accordées par les autorités algériennes et au concours des autres partenaires. L´État algérien ainsi que des entreprises algériennes et des filiales d´entreprises françaises en Algérie ont participé à ce montage fort encourageant. Les travaux de restauration ont été confiés à une entreprise française qui s´est associé des compétences algériennes.

Un des points bénéfiques a été l´ouverture d´un chantier École, au profit de jeunes professionnels algériens, notamment issus de la Casbah, pour se former aux métiers de la restauration, de la taille de pierre et de la maçonnerie sur patrimoine ancien. Notre-Dame d´Afrique appartient à l´histoire, c´est un patrimoine commun à tous les Algériens, pas seulement aux chrétiens.

Le dialogue des cultures, des religions et des civilisations est un chemin bénéfique pour tous. Chacun découvrant et appréciant l´autre, par l´interconnaissance, dans le respect de la différence appréhendée comme richesse. Le sens de l´ouvert et la pulsion de vie devant toujours l´emporter sur le repli. La mondialité et les défis communs appellent tous les peuples à échanger et à partager leurs expériences et aspirations.

Au moment où au Moyen-Orient, à cause des politiques iniques d´agression et d´occupation, des actes inadmissibles sont perpétrés par des groupuscules contre des Arabes chrétiens et qu´en Occident, comme hier pour l´antisémitisme, la xénophobie et le sentiment antimusulman s´amplifient, la restauration de la Basilique Notre-Dame d´Afrique est un acte qui montre qu´il n´y a pas que de la violence, de l´intolérance et de l´inimitié dans le monde, mais aussi des signes de respect de l´altérité, de l´amitié et de l´espérance.

Professeur des Universités Mail : intellectuels@yahoo.fr

Mustapha CHÉRIF (*)

Lire aussi l’article « Madame l’Afrique » se pare de ses plus beaux atours de Nadir Iddir dans El Watan du 14 décembre 2010.

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El Watan du 14.10.2010

Dans le Figaro du 15 décembre 2010, sous la plume de Arezki Aït Larbi la restauration de la basilique est également présentée :

Le Figaro Mercredi 15 décembre 2010

À Alger, la résurrection de Notre-Dame d’Afrique.

La basilique a été restaurée grâce une exceptionnelle coopération franco-algérienne.

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Notre Dame d’Afrique
Dimanche dernier, une foule de fidèles et de dignitaires ont assisté à la cérémonie de réouverture de « Madame l’Afrique », à Alger.

MAGHREB. Liftée, maquillée, fortifiée, « Mme l’Afrique », comme l’appellent les Algérois, retrouve une seconde jeunesse, après avoir failli tomber en ruines. Construite au milieu du XIXe, la basilique Notre-Dame d’Afrique deviendra un symbole décrié de la conquête française qui consacre, pour le cardinal Lavigerie, « la victoire de la croix sur le croissant ». Avec le temps, et grâce à l’action sociale des Pères blancs, le monument s’impose peu à peu comme un sanctuaire de tolérance et de fraternité. Sur son parvis, qui offre une vue imprenable sur la baie d’Alger, la basilique reçoit chaque année plus de 100 000 visiteurs, en majorité des musulmans. Même durant les années de terreur islamiste au cours desquelles 18 prêtres catholiques ont été assassinés, une étrange baraka protégeait les lieux, pourtant nichés au cœur d’un quartier populaire.

L’appel de Mgr Teissier Si l’édifice a résisté à la fureur des hommes, lézardes, fissures, corrosion des pierres et bris des vitraux sont autant de stigmates qui témoignent de l’outrage du temps. Depuis le séisme de mai 2003, ce joyau architectural, mélange d’inspiration romane, byzantine et mozarabe menaçait de s’écrouler. Miracle, l’appel au secours de WF Teissier, alors archevêque d’Alger, sera entendu de part et d’autre de la Méditerranée. Les gouvernements algérien et français, l’Union européenne, la région Paca, le conseil général des Bouches du Rhône, la mairie de Marseille, des entreprises et des mécènes des deux pays apportent leur obole. En quelques mois, le montage financier est bouclé. Coût de l’opération : plus de 5 millions d’euros.

La wilaya (préfecture) d’Alger qui a assuré la maîtrise d’ouvrage, confie les travaux à une entreprise d’Avignon, qui s’installe dès juillet 2005, pour sécuriser le site. Après la mise aux normes antisismiques, commence la partie artistique de la restauration. Les voûtes des 4 clochetons et du campanile sont démontées ; les pierres sont numérotées, copiées, avant d’être remontées comme un puzzle. Les parements des façades sont réparés et nettoyés ; sur le chantier, 28 jeunes Algériens sont formés aux métiers du patrimoine. Les 46 vitraux, déjà soufflés par le bombardement d’avril 1943, revivent dans l’atelier d’un maître verrier de Marseille. La statue de la Vierge en terre cuite endommagée, est reconstruite en pierre.

Lundi, musulmans et chrétiens ont célébré « ce symbole de la coopération entre l’Algérie et la France, entre le nord et le sud de la Méditerranée ». Mgr Ghalib Bader, archevêque d’Alger depuis 2008, plaide pour « une Algérie fraternelle, riche de sa diversité ». Aux côtés d’élus de Provence et de dignitaires catholiques et musulmans, Bouabdellah Ghoulamah, le ministre algérien des Affaires religieuses, et Abdelaziz Belkhadem, patron du FLN et ministre d’État sont de la cérémonie et prônent la liberté de culte.

La veille, en Kabylie, quatre chrétiens ont été condamnés à 2 mois de prison avec sursis ; ils avaient « créé un lieu de culte sans autorisation ».


« Madame l’Afrique » article de Mehdia Belkadi. Photos : B. Souhil weekend@elwatan.com publié dans El Watan du vendredi 17 octobre 2010.

Paroles d’officiels « Le monde est souvent confronté à l’individualisme. L’homme a besoin de trouver des havres de paix et des espaces de dialogue. Notre-Dame d’Afrique doit faire partie de ces hauts lieux dans lesquels l’homme peut se réconcilier avec lui-même d’abord, ensuite avec l’Homme et avec Dieu », Ghaleb Bader, archevêque d’Alger.

« Il n’y a aucune forme de restriction dans la pratique religieuse ni aucune distinction entre les musulmans et les chrétiens. Toutes les parties sont tenues de respecter les lois et la législation relative à la pratique religieuse. » Abdelaziz Belkhadem, ministre d’Etat, représentant officiel du président de la République.

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El Watan 17 décembre 2010 Madame l’Afrique
article de Mehdia Belkadi

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